Était-ce cette fille la fameuse Danielle ?
Elle ne ressemblait en rien à ce que Jules avait imaginé.
Il pensait que cette fille que la famille Bourgeois avait ramenée de la campagne serait laide et sans style.
Wow ! Quelle beauté ! pensa-t-il.
Il avait autrefois rencontré Priscille, la deuxième jeune demoiselle de la famille Bourgeois. Elle était déjà considérée comme très haut de gamme parmi les enfants issus de familles fortunées. Cependant, comparée à l'apparence et à l'aura de Danielle, elle semblait si peu attirante.
Toujours debout, Renaud regarda Jules, qui fixait Danielle, et prétendit tousser.
Revenant à ses sens, Jules réalisa sa perte de convenance. Il rit rapidement pour dissimuler sa surprise, redressa sa posture et prit l'attitude d'un homme important, attendant que Danielle le salue en premier.
"C'est monsieur Jules Gourmand de l'université de Luminara. Il a été envoyé par M. Arnaud Monet de l'université de Luminara pour vous remettre une lettre !" expliqua Renaud à la jeune femme.
À ce moment, Jules était perplexe.
Ce Renaud n'était-il pas trop respectueux envers cette fille ? Elle était juste une simple fille perdue puis retrouvée après plus de vingt ans. Bien qu'elle soit belle, tout ce cirque n'était pas nécessaire, pensa-t-il.
Il n'était pas sans savoir que la haute société avait ses propres règles. Quel genre de perturbations une personne qui débarquait de nulle part et n'avait aucune famille maternelle sur laquelle s'appuyer pourrait-elle donc provoquer ?
Était-il nécessaire d'être si respectueux ? se demanda-t-il. Il se dit ensuite qu'après tout, il n'était qu'un serviteur. Une personne superficielle certes, mais différente. Il était éducateur et surtout directeur, un officiel de l'université de Luminara dont tout le monde aspire à faire partie. Cette Danielle devrait donc lui montrer plus de respect si elle comptait réussir ses études. Alors qu'il pensait ainsi, son mépris et son arrogance se firent remarquer à travers son expression faciale.
Danielle était habillée d'un jean en denim ample et d'un t-shirt blanc sous un blouson de sport, et elle se prélassait nonchalamment contre la balustrade. En entendant les mots de Renaud, il n'y eut aucune surprise dans ses yeux.
Le majordome admirait vraiment le calme de la jeune femme.
"Envoyé par Arnaud ? Apporte-le ici", lui ordonna Danielle.
À ses mots, Jules fut choqué. Il attendait là depuis longtemps. Mais au lieu de s'excuser auprès de lui et de le saluer poliment, cette fille l'avait complètement ignoré.
Arnaud ? Avait-elle même le droit d'appeler le directeur par son prénom ?
Quelle arrogance de la part de quelqu'un qui n'a pu entrer à l'université de Luminara que par la petite porte !
Jules ressentit une vague de colère dans son cœur. Il regarda Danielle prendre la lettre des mains de Renaud, l'ignorant complètement, et ne put s'empêcher de lancer une série de remarques sarcastiques.
"Mademoiselle Bourgeois, surveillez votre comportement. Je suis ici depuis si longtemps, et vous ne pouvez même pas me jeter un coup d'œil. Quelle impolitesse !" dit-il.
À ses mots, Danielle qui retournait déjà dans sa chambre s'arrêta et tourna la tête pour le fixer avec un regard à la fois beau et froid. On pouvait même y déceler une pointe d'agacement si on regardait de près.
"Avez-vous besoin de quelque chose ?" demanda-t-elle à l'homme.
"Pensez-vous être agréable à regarder ? Voulez-vous vraiment que les gens vous voient ainsi ?" reprit Jules, toujours blessé dans son ego.
"Êtes-vous malade ?" demanda de nouveau Danielle.
Jules, outré par les mots de cette dernière, fut tellement déconcerté qu'il bégayait et ne pouvait pas parler.
Voyant à quel point il était véritablement bouleversé par le sang-froid de Danielle, Renaud envisagea d'intervenir pour désamorcer la situation.
Danielle était encore trop jeune et Jules était un homme qui absorbait profondément les rancœurs. Il était presque furieux contre elle. Le majordome craignait que l'autre ne rende la vie difficile en secret à la jeune femme. Après tout, en tant que directeur instructeur, il avait de nombreuses occasions de perturber un étudiant.
Comment Danielle survivrait-elle dans l'université de Luminara si elle se mettait un tel homme à dos ? pensa-t-il.
Alors qu'il s'apprêtait à avancer et à dire quelque chose, il entendit Roger dire d'une voix glaciale : "Que ma fille connaisse ou non la bienséance ne vous regarde pas, M. Gourmand."
Au départ, l'homme avait l'intention de descendre et de voir pourquoi Jules était chez lui. Il se demandait si Arnaud avait quelque chose de nouveau à dire par rapport à leur négociation.
Il venait à peine d'entrer dans le salon quand il entendit Jules faire des remarques acerbes à sa fille sur un comportement inapproprié.
Il le trouva bien audacieux. Comment pouvait-il venir sur son territoire et insulter sa fille ?
En entendant ces mots et en voyant Roger s'approcher avec un visage sévère, Jules eut soudain un moment de lucidité.
Il avait agi impulsivement. Même s'il voulait punir Danielle, il aurait eu de nombreuses occasions à l'université. Pourquoi avait-il fallu qu'il décide de la confronter sur place ?
Quoi qu'il en soit, il ne voulait pas retirer ses mots. Il était d'ailleurs déjà trop tard pour le faire. De plus, s'il s'excusait, qu'adviendrait-il de son autorité en tant que directeur ? pensa-t-il.
Après un bref face-à-face, il trouva finalement une excuse pour battre en retraite.
"Comme vous ne me souhaitez pas la bienvenue, je ne vais plus vous déranger ici. Huh, maintenant que j'ai remis la lettre du principal, j'accueillerai certainement mademoiselle Bourgeois sur le campus en temps voulu la semaine prochaine. J'espère que vous trouverez votre vie sur le campus de l'université de Luminara ‘spectaculaire", dit-il.
Il appuya volontairement sur le dernier mot.
Spectaculaire ?
En silence, Danielle réfléchit un moment. Spectaculaire en quoi ? se demanda-t-elle. Toujours debout, Roger saisit la menace dans les mots de Jules, et son ton devint encore plus désagréable.
"Renaud, conduis-le jusqu'à la sortie", tonna-t-il.
Jules maudissait et marmonnait en s'éloignant de la porte de la famille Bourgeois. Il était arrivé avec arrogance et repartait la tête basse. Quelle honte !
Il était furieux, fixant la porte, jurant dans son cœur de faire payer Danielle.
De l'autre côté, dans le salon, après avoir vu Jules partir, Roger insista pour que sa fille reste pour prendre le thé.
Pour une fois, la jeune fille obéit sans broncher.
Elle s'assit tranquillement sur le côté.
Mais lorsqu'elle prit sa tasse, elle finit le thé d'un seul trait, comme si elle buvait de l'eau. En la voyant faire, Roger voulut lui dire plusieurs fois : "Ce n'est pas comme ça que l'on boit le thé. Il faut le savourer."
Mais chaque fois qu'il était sur le point de parler, Danielle le regardait d'un air décontracté.
Très bien alors. Qu'elle le boive comme elle l'entend, pensa-t-il.
Tout ce temps, Danielle laissa de côté la lettre que Jules avait apportée, comme si elle fut sans intérêt. Pendant que le chef de famille buvait son thé, ses yeux la balayèrent au moins dix fois.
Durant ce temps, la jeune femme jouait avec un téléphone portable noir, sans relever la tête.
"Tu peux la lire si tu le veux", dit-elle subitement.
Sur le coup, Roger fut si choqué qu'il lui fallut un moment pour répondre.
"Hmm ? Que veux-tu dire ? Me permets-tu de la lire ?" demanda-t-il.
En guise de réponse, Danielle le regarda froidement et avec impatience.
Dans la perception de Roger, ce regard était comme pour dire : "Es-tu idiot ou sourd ?"
"Eh bien, alors, je vais la lire. Ne regrette pas plus tard !" dit-il.
Baissant de nouveau la tête, Danielle trouva cela quelque peu amusant.
Son père agissait comme un mignon petit garçon malgré son âge avancé.
Sans se faire prier, Roger ramassa soigneusement l'enveloppe et l'ouvrit.
Aussitôt, les mots "Lettre de recommandation d'admission" attirèrent son attention.
Il fut tellement surpris que le papier tomba de ses mains.
Il le ramassa rapidement et lut attentivement la lettre. Le choix des mots était assez suggestif, révélant un sentiment d'importance.
La "Lettre de recommandation d'admission" était une procédure spéciale établie par l'université de Luminara pour les talents exceptionnels. Elle était différente de la lettre d'admission qu'il avait obtenue pour Danielle grâce à un don clandestin.
Ce genre de lettre ne pouvait être émis personnellement que par le principal de l'université de Luminara, Arnaud. Lui Roger savait à quel point le processus était rigoureux. Au fil des ans, le nombre de "Lettres de recommandation d'admission" envoyées par Arnaud pouvait être compté sur les doigts d'une main.
À ce stade, l'homme réprima ses émotions et essaya de paraître calme.
"Une lettre d'Arnaud ? Sais-tu ce qu'il y a dans la lettre, Danielle ?" demanda-t-il tout excité.
À sa question, Danielle leva lentement la tête, une lueur de sauvagerie dans ses yeux sombres. Elle ne jeta même pas un regard à la lettre dans la main de son père.
Avec un faible "Mm", elle continua à jouer avec le téléphone dans sa main.
'Hein ? C'est tout ?" dit l'homme, encore plus choqué.
Sa fille était très calme, alors que lui, il était dans tous ses états.
"Pourquoi ne pas m'avoir dit plus tôt que tu avais déjà une admission pour cette université prestigieuse ? Pourquoi me l'avoir caché ?" demanda encore Roger.
Lorsqu'il prononça ces mots, Danielle qui jouait avec son téléphone cessa tout mouvement et le regarda droit dans les yeux avant de dire : "Je te l'avais dit auparavant, mais tu ne m'avais pas crue."
En entendant cela, Roger resta sans voix, car il se souvint que la veille, dans le bureau, Danielle voulait effectivement dire quelque chose et qu'il l'avait interrompue.
De toute évidence, il avait commis une énorme erreur, pensa-t-il.
Juste au moment où il voulait poser davantage de questions, Alexie et Priscille firent irruption dans la pièce.