André a longtemps observé Catherine, il se faufilait dans le regard de celle-ci une faible trace de haine, et de destruction. André n'a pas posé plus de questions ; il n'en posait presque jamais d'ailleurs parce que chaque accord qu'il passait avec Catherine était une situation gagnante-gagnante : elle lui fournissait des sujets et lui se chargeait de nourrir sa côte avec les informations en question.
- Considérez que c'est fait Mlle Lan, tout sera fait dans moins d’une heure.
Très contente de ce qu’elle venait d'entendre, Catherine s'est levée.
- C’est toujours bien de traiter avec vous M. Koyann. Catherine a témoigné en serrant la main à André.
Elle a ensuite quitté le bureau. A sa sortie, la secrétaire a une fois de plus grimacé après son passage.
Philippe avait choisi d'envoyer sa fille dans le plus grand établissement de la ville, voire du pays car il voulait le meilleur pour elle. Une fois sur les lieux, Lilibet était conquise par l’environnement ; la décoration des lieux, les équipements de l'école, l'architecture, tout la fascinait. Alors qu'elle s'amusait à sauter sur le trampoline dans la cour, Philippe, Erina et le directeur de l'école marchaient en discutant entre adulte.
- Monsieur Huiret, je vous promets que vous n'allez pas regretter d'envoyer votre fille chez nous, elle sera vraiment aux petits soins et nous vous promettons de toujours garder un œil sur elle. Le directeur a déclaré. Philippe était content, très content d'entendre ce qu'il venait de dire. Alors, à son tour, il a exprimé :
- Je n'en doute pas M. Fenvok, j'ai inscrit ma fille dans cet établissement parce que je connais son potentiel, je vous fais confiance pour lui donner le meilleur.
Tous deux satisfaits, ils se sont serrés les mains en souriant de satisfaction. Le directeur s’est ensuite tourné vers Erina, lui a également tendu une poignée de main qu'elle a serré en retour.
- Madame Huiret, ce fut vraiment un plaisir de vous recevoir.
Erina a hoché la tête en expliquant:
- En fait c’est Madem…
Erina a tenté de corriger le directeur sur son appellation mais Philippe s’est hâtée de l’interrompre :
- Nous allons vous laisser vaquer à vos autres occupations M. Le directeur.
Le directeur a hoché la tête avant de les laisser. Philippe avait toujours un léger sourire aux lèvres et les yeux rivés sur Erina. Il devinait sans doute qu’elle était contrariée par l’appellation du directeur tout à l’heure mais cela lui plaisait bien d’entre qu’elle soit appelée ainsi. Une fois le directeur hors de vue, Philippe lui a demandé :
- Comment tu la trouve ? Est-ce qu’elle te plait ?
- Oui, mais je trouve ça juste trop voyant ; on aurait pu l'envoyer dans un établissement simple. Non ?
- Rina, j'aime bien ta modestie mais il s'agit là de l'éducation de Lili, elle mérite ce qu'il y a de mieux, oublie un peu ta simplicité et laisse-la être bien formé.
Agacée, Erina a roulé des yeux et appelé Lilibet pour qu'elle les rejoigne afin qu'ils puissent rentrer. Une fois dans la voiture, Philippe était prêt à démarrer. Une main sur la clé et l'autre sur le volant, il a demandé à Lilibet si elle avait attaché sa ceinture de sécurité. Sur ses mots, Erina a étiré son corps vers Lilibet pour vérifier si sa ceinture avait bien été attachée.
- Où est-ce que je vous dépose ? A la maison ? Philippe a demandé à Erina.
- Euh… non. A-t-elle répondu.
- Bien, où donc ? Philippe lui a lancé un regard furtif.
Erina est devenue nerveuse. Elle s'est grattée la tête, gênée.
- En fait, je me disais qu'on pourrait aller manger quelque chose. Lili n'a rien mangé depuis ce matin, en dehors des crudités, il n’y a rien qu’elle puisse directement manger une fois à la maison. Au moment même où elle a fini ses mots, son ventre à elle a gargouillé, trahissant son état de famine. Philippe a haussé un de ses sourcils en la fixant.
- Seulement Lili ?
Erina était encore plus gênée mais s’est justifiée comme si de rien n’était :
- Je t’ai dit que nous n’avons rien mangé depuis le matin.
- Bon, en route donc pour le resto. Qu'est-ce que tu veux manger Lili ? Philippe lui a demandé.
- Quelque chose de bon. Lilibet a répondu toute heureuse.
Sur cet air joyeux de sa fille, Philippe a manœuvré la voiture pour prendre une direction sans donner plus de détails à Erina et Lilibet qui ne découvriront la destination qu’une fois sur place.
Le High Sky était un complexe reconnu dans la ville non pas uniquement par la hauteur de son édifice, ni pour la qualité de ses matériaux de construction, mais également pour le service qui y était offert ainsi que le standing de ses clients et ses prix exorbitants. Peu étaient ceux qui pouvaient se vanter d'entrer dans ce complexe. Le luxe à l’intérieur donnait l'impression d'être dans un autre monde. Il était vaste, beau, plein de petits endroits pas seulement pour les petits enfants mais également pour les adultes. Chacun y trouvait son compte. Philippe avait opté y emmener Lilibet et Erina car il aimait le calme et le repas qu’on y servait. Philippe, Erina et Lilibet ont pris l'ascenseur pour le dernier niveau qui se trouvait être une terrasse. Il aimait la vue à cette heure. Les rayons du soleil qui caressaient leur peau étaient assez faibles, ce qui procurait une chaleur réchauffante. Philippe a fait un signe des doigts et une serveuse a immédiatement accouru vers eux avec des cartes de menus qu’elle les a remises, avant de se retirer ensuite. Philippe était plongé dans la lecture de sa carte mais il pouvait sentir les regards qu’Erina lui lançait de temps en temps par-dessus la sienne. Erina examinait sa mine pour déceler s’il était adéquat de lui demander le service dont son amie Lima l’avait chargé. Lorsqu'elle a senti que Philippe était sur le point de lever la tête, Erina a rapidement baissé la sienne pour éviter de confronter son regard. Philippe lui a jeté à son tour un coup d'œil, a souri, s’est replongé dans son menu.
- Tu as déjà fait un choix ? A-t-il demandé à Erina.
- Non, pas encore. Erina a répondu.
- Si tu ne sais pas quoi choisir, je peux le faire pour toi.
- Non, laisse, je peux faire mes choix de nourriture ; je pense qu'il me reste encore ça au moins. Erina a terminé pleine de ressentiments.
Philippe l'a regardé en silence puis il s’est tourné vers Lilibet.
- Et toi Lili ? Lui a-t-il demandé.
- Je mange ce que tu manges.
Lilibet avait son menu posé sur ses genoux. Elle avait l’air concentrée vu de l’extérieur mais en réalité, elle n’y comprenait pas grand-chose.
- Okay. Philippe a rétorqué.
Avec l'accord d'Erina, Philippe a fait signe à la serveuse de tout à l’heure. Elle est venue récupérer les cartes et pris la commande de chacun ; celle-ci a hoché la tête en guise d’affirmation et les a de nouveau laissé seuls. Philippe a croisé ses mains sur la table.
- Bien, tu me dis ce qu'il y a ?
- Ce qu'il y a ?! Erina s’est exclamée, surprise et confuse à la fois. De quoi tu parles ?
- Je ne sais pas, à toi de me dire. Tu avais des choses à faire et d’un coup tu changes d’avis et décide soudainement de nous accompagner Lilibet et moi pour visiter son école.
- On parle tout de même de l’école de ma fille, c’est normal que je veuille la visiter.
- D’accord, j’ai dû mal interpréter la situation, puisqu’il n’y a rien, passons dessus.
Erina a su que c’était l’occasion ou jamais de parler à Philippe. Elle était presque mise à nue et avait l'impression que ses intentions avaient été détectées par cet homme. Comme à chaque fois qu’il voyait juste, cela l'a agacé.
- Euh… en fait, il y a…
Philippe a levé les sourcils attendant patiemment ce qu'elle allait dire.
- Tu te souviens de mon amie Lima.
- Oui, celle de tout à l’heure.
- En fait, elle est journaliste et aimerait que tu lui accordes une interview.
Philippe a grimacé, il était clair que la proposition ne l’enchantait pas. Il s’est redressé en s’adossant contre le dossier de sa chaise.
- C’est juste quelques minutes, et c’est super important pour elle. Erina s’est empressée d’expliquer.
- Je déteste ces interviews, à chaque fois ils cherchent toujours à creuser dans la vie privée et c’est agaçant.
- Philippe, s’il te plait fais le pour Lili.
- Pour Lili ? Philippe s’est moqué. On dirait que ça t’arrange de l’utiliser pour te couvrir. Exprime-toi bien Erina, si tu me demandes de le faire pour toi je le ferai.
Il a regardé Erina droit dans les yeux. Elle était comme hypnotisée par cet instant, son regard était profond et ne demandait qu’à ce qu’elle apaise son cœur avec les mots qu’il voulait entendre.
- Dis-le Erina ; et je te promets d’y réfléchir.
- D’y réfléchir ?! Donc il n’y a aucune garanti.
- Ce sera avec une condition toute simple.
- Laquelle ?
- Passe le dernier weekend des congés avec moi, on emmènera Lilibet également. Qu’est-ce que tu en dis ? Tu es d’accord ? Sinon, cette interview n’est pas si importante.
- Tu ne rates décidément pas une occasion hein ?
- A toi de voir, tu es libre d’accepter ou pas mais ton amie sera très déçue si tu dis non.
- Est-ce qu’elle pourra te poser les questions qu’elle veut ?
- Tu es consciente qu’il y a des risques qu’elle fasse allusion à notre histoire n’est-ce pas ?
- Oui, je sais. Erina a répondu posément.
- Alors tu acceptes le deal ?
- Oui.
- Mais tu n’as toujours pas dit ce qu’il faut.
- Fais le pour moi Philippe.
Elle tient vraiment à son amie à ce point. Philippe a pensé au fond de lui.
Les mots d’Erina sonnaient sincères mais Philippe n’était pas sûr qu’elle les pensait vraiment. Après tout, elle les avait dit tout simplement parce qu’elle voulait quelque chose en retour et qu’il l’y avait contraint. Les deux soutenaient le regard l’un de l’autre. Toute émue, Lilibet regardait ses parents qui se dévoraient passionnément du regard.
Rhema était toute excitée par son premier rendez-vous de la journée. Elle n'avait même pas eu la tête à prendre son petit déjeuné avant de quitter la maison. Assise à l'arrière de la voiture, Rhema avaient des pensées voltigeantes ; elles étaient toutes centrées sur une seule chose, du moins, une seule personne : Lilibet. Son chauffeur l’observait de temps en temps à travers le rétroviseur. Rhema était dans son monde, beaucoup plus calme que d'habitude. Son regard était tourné vers l'extérieur de la fenêtre. On pouvait croire qu'elle observait le paysage qui défilait, mais ce n’était pas vraiment le cas, Rhema ne se rendait même pas compte des différents endroits qu'ils traversaient. Ce n'est qu’une fois arrivés à destination que son chauffeur lui a signalé :
- Nous sommes arrivés madame.
Rhema n'a pas réagi à ce qu'il venait de dire alors le chauffeur l’a de nouveau interpellé :
- Madame, madame, …
Il l’a répété plusieurs fois avant qu’elle a abandonné ses rêveries. Rhema a lancé un regard au chauffeur à travers le rétroviseur, ce dernier s’est rendu compte qu’il avait l’attention de sa patronne, alors il a repris une fois de plus :
- Nous sommes arrivés madame.
Rhema a regardé à l'extérieur et effectivement, ils étaient arrivés. Elle a attrapé son sac qui était posé près d'elle pendant que le chauffeur faisait le tour pour venir ouvrir sa portière. Une fois fait, Rhema est sortie de la voiture.
- Je ne mettrai pas long donc inutile d’aller loin. A-t-elle précisé.
L'homme a hoché la tête, a refermé la portière pendant que Rhema se dirigeait vers l’entrée de l'immeuble devant elle. Ce n’était pas sa première fois d’y aller, elle connaissait bien les locaux, par conséquent elle savait précisément où se rendre. La secrétaire assise à l'entrée du bureau s'est immédiatement levée par politesse dès qu’elle a aperçu Rhema arriver.
- Madame. L’a-t-elle aimablement accueilli le sourire aux lèvres.
Rhema a hoché la tête avant de demander :
- Est-ce qu’il est là ?
- Oui madame, il est là, laissez-moi vous annoncer.
Rhema n’a apporté aucune objection ; elle s’est montrée plus coopérative qu’à son habitude et s'est tranquillement tenue là à attendre que la jeune femme annonce sa présence au téléphone. Après quelques secondes, la jeune femme a raccroché le téléphone fixe, puis a donné à Rhema la permission d'entrer. Rhema n’a pas perdu le temps, elle est entrée, et a refermé la porte derrière elle.
- Maître Lujre. Rhema a introduit.
Le dit maître Lujre s'est immédiatement levé dès l'entrée de Rhema. Il lui a tendu une poignée de main.
- Madame Huiret, Quelle surprise !
Il s'est rassis, Rhema en a fait de même en occupant la chaise en face de maître Lujre.
- J’ai été vraiment très surpris par votre appel ce matin.
- Oui, je vous comprends et pardonnez-moi pour cette intrusion de dernière minute, je sais que vous êtes un homme très occupé.
- Ne vous dérangez pas, vous savez que je suis toujours disponible pour les Huiret. Donc, que puis-je faire pour vous ? L'entreprise rencontre-t-il un problème ?
- Oh non ! Ne vous inquiétez pas pour ça. Je suis là pour toute autre chose, une situation beaucoup plus personnelle.
- D'accord, je vous écoute.
- Je suis là pour ma petite fille.