‘’ Philippe t’aime tellement, il a beau être froid envers tout le monde mais avec toi c’est différent, il témoigne ouvertement ses sentiments et redevient ce petit garçon qu’il a été autrefois.’’
Assise sur le canapé installé près de la fenêtre de sa chambre, Erina a plusieurs fois repassé ces mots que Dora lui a dits hier soir. Elle a agité sa tasse de café qu’elle tenait entre les mains et en a bu quelques gorgées avant de replonger dans ses pensées jusqu’à ce qu’un coup de sonnerie la ramène à la réalité.
Ding Dong
Erina a regardé dans la direction de la porte comme si elle pouvait voir à travers l’épaisse porte en bois la personne qui se trouvait à l’entrée de sa maison. Elle a posé sa tasse sur la commode près de son canapé puis a attrapé un peignoir pour recouvrir la nuisette avec laquelle elle avait passé la nuit. Ensuite, elle a quitté la chambre pour aller ouvrir la porte.
- Comme ça on débarque à H Country sans prévenir sa meilleure amie hein…
Quand elle a ouvert la porte, Lima lui a tout de suite fait les reproches qu’elle gardait dans son cœur durant le chemin. Les deux femmes se sont joyeusement étreintes et Lima est ensuite entrée.
- Je suis désolée de ne pas t’avoir dit que je viendrai mais tout a été si vite. Erina s’est excusée en refermant la porte.
Erina a resserré les cordes de son peignoir en suivant sa meilleure amie qui se dirigeait dans le salon.
- Waouh ! La classe ! Elle est vachement cool ta maison.
Erina a souri devant l’émerveillement de Lima. Celle-ci a toujours eu une façon bien à elle de s’extasier.
- Eh bien, c’est l’entreprise qui l’a choisi pour moi donc je n’ai aucun mérite. A expliqué Erina.
- Wow ! Et t’arrives à payer ça ?
- En fait, c’est toujours aux frais de l’entreprise ; du moins jusqu’à ce que je me trouve autre chose.
Lima s’est affalée sur le canapé en commentant avec un semblant de bouderie :
- Ah ça ! Ma grande, je t’envie vraiment. Moi je dois me contenter de ce minuscule studio qui fait à peine 100m².
Erina s’est à son tour assise sur un autre canapé et a réconforté Lima.
- De quoi te plains-tu ? Tu y passes à peine la nuit.
- Oui mais je suis sûre que s’il était aussi bien tape à l’œil comme le tien je ne ferai pas tout mon possible pour y passer moins de temps comme je le fais chaque jour.
- Enfin bref… Bien, vas-y, raconte : pourquoi t’as débarqué dans la ville sur un coup de tête ?
- Une contrainte des circonstances.
- Est-ce que par hasard cette contrainte s’appellerait Philippe ?
- Bah…
- Je m’en doutais un peu. Alors, comment ça se passe entre vous ?
- On fait du mieux qu’on peut dans l’intérêt de Lili.
- Tu ne vas pas me faire croire qu’entre vous il n’y a eu aucun rapprochement…
Erina a roulé les yeux en réponse au sourire malicieux de Lima, ensuite elle s’est levée et dirigée vers le mini bar pour servir deux verres d’eau. Lorsqu’elle est revenue et en a tendu un à Lima, celle-ci s’est plainte :
- De l’eau ! Si je voulais boire de l’eau je serai restée chez moi me faire plaisir.
Erina a impuissamment secoué la tête en souriant puis elle est allée vers le frigo. Heureusement pour elle, il y avait des boissons. Elle a porté une bouteille de scotch qu’elle est ensuite allée servir dans le verre de Lima. Lima l’a ramené à sa bouche et l’a avalé comme si elle étanchait une soif qui sévissait en elle depuis plusieurs années. Lorsqu’elle a sorti le verre de sa bouche et qu'elle l'a posé sur la table, la moitié avait été vidé dans son estomac. Lima a tapé sa langue contre le palais de sa bouche, ensuite elle s'est rallongée de façon détendue sur le canapé. Comme si elle avait soudain été piquée par un objet, elle s’est rapidement relevé, s’est assise en gardant une de ses jambes pliée sous son autre cuisse.
- Bon, maintenant je veux tout savoir dans les moindres détails. Est-ce que ton retour définitif signifie que tu es de nouveau en couple avec Philippe ? Elle a demandé à Erina.
- Quoi ? Non, pas du tout. Erina a répondu l’air offusquée avec une trace de dégoût. Elle a ensuite repris sa voix normale pour continuer : si je suis ici c'est uniquement pour Lili.
Lima lui a lancé un regard taquin.
- Tu en es sûre ? Parce qu'on dirait que toi même tu ne crois pas à ton excuse.
- Orh ! Tu racontes n'importe quoi.
- Enfin, bref… Lima a lancé après avoir passé plusieurs secondes à remuer ses pensées et fixant Erina.
Elle a ensuite attrapé son verre qu’elle avait posé sur la table, l’a vidé et s’en est resservie un autre.
- Maman. La petite voix toute mignonne de Lilibet est venu contraster le petit temps de silence du salon.
Elle s'est avancé vers les deux femmes en se frottant les yeux.
- Viens par-là ma petite frimousse. Lima a dit à Lilibet en l’attrapant lorsqu'elle est arrivée devant elles.
Lima s’est mise à la chatouiller. Les rires de Lilibet étaient forts et remplissaient tout le salon. Lima a arrêté de chatouiller la petite fille tout d’un coup, s’est rétractée en s’adossant sur le canapé et en croisant ses bras au niveau de sa poitrine.
- Alors, comme ça on vient à M country sans prévenir sa taty Lima hein, je me sens vraiment trahie. Lima s’est plainte armée d’une expression boudeuse.
- En fait je… Lilibet ne trouvait quoi dire pour sa défense.
Elle s’est retournée vers sa mère pour demander silencieusement du renfort. Erina a fixé en se moquant de la Lilibet embrouillée.
- Bien, est-ce que tu t'es brossée les dents ? Erina a demandé à Lilibet.
- Non. Lilibet a répondu.
Lilibet a saisi là une occasion de s’échapper du salon. Elle n’a pas perdu de temps et a couru vers la salle de bain en criant :
- J’y vais.
Laissées à nouveau seules au salon, Lima a demandé à Erina :
- Comment elle vit tout ça ?
Erina a guetté la direction dans laquelle Lilibet a disparu un instant plus tôt avant de répondre :
- Le meilleur moment de sa vie je dirai ; elle a retrouvé son père et vit maintenant dans la même ville que lui. Erina a continué avec un ton semblant inquiet : j'ai peur de la perdre. Du moins, j'ai l'impression que je suis déjà en train de la perdre.
- Ne dis pas ça, c'est ta fille elle a grandi avec toi. Je suis sûre que peu importe son attachement pour Philippe, elle ne pourra jamais s'éloigner de toi.
- Je crois plutôt qu'elle s'éloigne de jour en jour. Quand elle est avec son père j'ai l'impression de ne plus exister, j'ai l'impression de devoir forcer pour trouver ma place entre Philippe et elle.
- Sinon, ça se passe bien entre lui et toi ?
- Bien, nous sommes les parents de Lili, on fait tout notre possible pour qu’elle soit toujours notre priorité, aussi simple que ça.
- Mais… je veux dire… vous deux, votre relation, comment ça évolue ?
Erina a levé ses sourcils, son amie venait d’engager sa fouine. Bien qu’elle avait sa petite idée de ce que Lima cherchait à lui faire dire, Erina lui a sereinement répondu :
- Comment je peux te dire ça ? Rien d'extraordinaire en fait. On se supporte.
- Vous vous supportez ! Dans quel sens ?
- Comment ça dans quel sens ? Erina s’est écriée et a continué : et en plus, c’est quoi toutes ces questions ?
- C’est bon, pas la peine de t’enflammer. Je… en fait je…
Erina a froncé les sourcils en observant attentivement Lima. Elle était remplie d’impatience de voir ce que cachait l’interrogatoire de cette dernière. Voyant son impatience qui était sur le point de virer à de l’ennui, Lima s’est jetée à l’eau :
- Peux-tu lui demander un service pour moi ?
- Un service ?! Quel genre de service ?
- En fait… je… J’ai besoin que tu convainques Philippe de m’accorder une interview.
Erina s’est levée de sa chaise et s’est dirigée vers la fenêtre.
- Lima… . A-t-elle lancé sur un air hésitant.
Lima s’est à son tour levée et s’est dirigée au même endroit essayant toujours de convaincre Erina.
- S’il te plait Erina, fais ça pour moi, juste ça.
Erina a quitté la fenêtre, a traversé Lima en déclarant :
- Tu sais que je ne peux pas demander une telle chose à Philippe. Je ne sais pas moi… fais une demande officielle ou la procédure habituelle pour le lui demander.
- En fait, Philippe accepte rarement les interviews ; mais je suis sûre que tu peux le convaincre d'accepter de m'accorder une exclusivité. Juste une seule, je t'en prie, une seule. Avec ça, je pourrais espérer une promotion. En plus si j'assure, ça pourrait booster ma carrière, m'ouvrir tellement de portes.
- Pourquoi ne pas essayer par la procédure officielle ?
- Il n'acceptera pas. Plusieurs personnes du monde de la presse ont essayé, il les a tous décliné. Lima a continué sur un air rusé : en plus, il faut bien que notre amitié me serve. Non ? Elle a repris sa voix suppliante : c’est pour ma carrière Erina. Je ne comprends pas comment tu peux hésiter, moi je t’aurai rendu un tel service sans broncher.
- Tu m’en demandes un peu trop, s'il a pour habitude de refuser, c'est peut-être pour une raison. Je ne peux pas le contraindre à faire quelque chose qu’il ne veut pas. En plus, je ne vois pas ce que je pourrai y faire.
- Ah oui ! Tu crois ?! Ça se voit que Philippe te mange carrément dans la main, il ferait tout pour te faire plaisir. S'il te plaît Erina, dis ouii.
Erina a regardé Lima sans plus rien dire. Elle se sentait impuissante et face à un dilemme. Elle s’était promise de ne jamais rien demander à Philippe qui n’ai pas de lien avec Lilibet, de rester uniquement dans le cadre d’une relation coparentale. L’enjeu de la demande de son amie était important pour elle. Et ça, Erina le savait. Elle est restée silencieuse, se demandant ce qu’elle devait faire à présent.
La petite Lillibet est revenue au salon en trombe, tenant entre ses mains le téléphone d’Erina qui était en train de sonner.
- Maman, maman, c'est papa. A-t-elle annoncé avec excitation.
Erina a récupéré le portable, a levé la tête pour fixer Lima. Leurs regards se sont rencontrés. Lima était impatiente qu’Erina décroche l’appel. Celle-ci a dégluti avant de finalement répondre.
- Philippe. A-t-elle répondu d’une voix neutre.