Trois mois plus tard…
La grossesse n'était pas facile. C'est ce que j'ai réalisé alors que mon ventre grossissait et que je devenais de plus en plus effrayée et inquiète. Je m'inquiétais de toutes les choses qui pourraient mal se passer pendant l'accouchement. Je ne voulais pas mourir. Je voulais être là pour mon enfant.
Outre l'inquiétude et la peur, il y avait mes sautes d'humeur. Je dois dire que Faust était très patient avec moi et je me sentais parfois mal pour lui. Je me sentais même mal pour Carla et Daniele qui devaient supporter mes éclats.
Youssef et Quentin me suivaient partout comme d'habitude et de temps en temps, je leur criais dessus aussi.
Parfois parce que je voulais être seule et d'autres fois sans raison particulière. Eh bien, c'est ce qui se passe quand on ne dort pas assez parce que le ventre est dans le chemin, quand on a constamment faim et que tout est inconfortable.
"Daniele, Carla je ne veux plus que vous travailliez pour moi. Trouvez quelqu'un a qui je n'aurais pas de remords à crier dessus. Comme cette domestique Jessica ou n'importe qui que vous n'aimez pas." J'ai dit avec un sentiment de culpabilité en pensant à mes sautes d'humeur.
"Non, Madame. Je ne fais confiance à personne pour s'occuper de vous maintenant et puis, c'est ce que j'ai toujours voulu faire. Prendre soin de vous et de votre enfant." Carla a dit, et Daniele a acquiescé.
"D'accord, mais ne me détestez pas, s'il vous plait." J'ai imploré.
"C'est impossible, Madame." Daniele a souri.
J'avais tellement de chance de les avoir, même Youssef et Quentin et tous ceux qui avaient été patients avec moi. Dina qui était là pour moi comme une mère et Emilie qui écoutait toutes mes conneries.
Oh, et maintenant elle était mariée à Amandin. Leur mariage était extravagant et connu de tous les royaumes. Clairement, le père d'Amandin était un homme très puissant qui a même aidé le frère d'Emilie à agrandir son royaume. Maintenant, le roi assoiffé de sang était
encore plus redouté. J'ai toujours trouvé le frère d'Emilie effrayant, mais je dois admettre qu'il était très malin.
Faust était aussi redouté mais les habitants de notre royaume l'aimaient. La plupart d'entre eux du moins. Il s'était fait quelques ennemis en chemin, surtout les riches et puissants. Ceux-ci voulaient se nourrir des pauvres au lieu de les aider. Mais Faust était intouchable maintenant, surtout avec son armée de démons.
Outre mes propres difficultés de grossesse, je dois dire que ces trois derniers mois ont été très paisibles. Faust n'était pas aussi occupé qu'avant et après s'être réconcilié avec sa mère, il a passé beaucoup de temps avec elle.
Les choses allaient également un peu mieux avec son père. J'ai réalisé que les hommes sont juste lents quand il s'agit de s'exprimer, ce qui rendait la situation plus difficile qu'elle n'aurait dû l'être.
Amandin et Faust sont devenus encore plus proches et parfois, nous quatre, y compris Emilie, déjeunions ou dinions ensemble tout en discutant de toutes sortes de choses. Parfois, Dina et Conan se joignaient à nous aussi.
Un soir, alors que Emilie et moi passions du temps ensemble, elle semblait triste et absente. "Qu'est-ce qui ne va pas?" J'ai demandé.
Elle secoua la tête. "Rien."
"Est-ce toi et Amandin?"
Elle soupira. "Non, pas vraiment. Je me sens mal... j'ai l'impression de leur cacher la chose du démon à mes frères et sœurs. C'est comme si je ne pouvais plus les regarder dans les yeux parce que j'ai trop menti."
"Ton frère pourrait déjà le savoir," dis-je.
Je me suis souvenu de mes conversations avec lui. Il croyait que Faust était le diable. Aussi, de l'histoire de Dina, les rois puissants savaient généralement à propos des démons et des sorcières, tout comme l'ancien roi de Lamotte.
Il y avait une grande chance qu'Alberto le sache déjà et cela pourrait être la raison pour laquelle il avait été si curieux à propos de Faust.
"Je ne... pense pas qu'il le sache." Elle a dit avec scepticisme.
"Pose la question et tu verras," j'ai suggéré. "Demande-lui s'il croit que les démons existent et ce qu'il en pense et à partir de là tu pourras décider si tu veux lui en parler ou non."
Je pouvais voir sur son visage qu'elle n'était pas convaincue, mais elle allait essayer. Emilie tenait beaucoup à sa famille et si celle-ci ne savait pas à propos des démons, les informer serait une décision qui changerait leur vie pour elle et pour sa famille.
"Tout ira bien," je lui ai assuré et je le pensais vraiment. J'avais vu comment Justine et Alberto traitaient Emilie. Ils étaient tellement protecteurs qu'ils la traitaient plus comme une fille que comme une sœur. Je savais qu'ils étaient une famille qui resterait toujours unie.
Parfois, je me demandais à quoi cela ressemblerait d'avoir une telle famille et parfois cela me faisait regretter ma mère, même si elle n'a jamais agi comme une mère. Je voulais qu'elle voie son petit-enfant. Je voudrais
visiter un jour. Même si elle n'était pas une bonne mère, elle restait ma mère. La femme qui m'a donné naissance et qui m'a porté pendant neuf mois.
Maintenant que je suis moi-même enceinte, je comprends les difficultés qu'elle a rencontrées.
Cette nuit-là, j'ai pris place dans notre chambre et je lui ai écrit une lettre. Je lui ai parlé de ma grossesse et que je lui rendrais visite à un moment donné. Je lui ai aussi dit qu'elle me manquait.
"Que fais-tu ?" Faust se tenait au-dessus de moi où je m'asseyais et regardait la lettre. Il posa sa main sur mon épaule. "Ta mère te manque ?" Demanda-t-il.
J'ai fait signe que oui.
Il s'est assis à la table et a pris ma main dans la sienne. "Tu vas rencontrer ta mère. Je m'en arrangerai. Si tu veux aller la voir ou l'amener ici, c'est à toi de décider."
"Merci." J'ai souri.
Je n'aurais jamais pensé que ma mère répondrait à ma lettre aussi rapidement et j'ai presque pu entendre la joie dans sa voix et pourtant il y avait une pointe de tristesse que j'ai ressentie. J'ai pleuré et je n'étais même pas sûr de savoir pourquoi. Peut-être que sa présence m'avait plus manqué que je ne le pensais et j'étais si heureuse qu'elle m'ait répondu.
Nous avons continué à nous envoyer des lettres au fur et à mesure que le mois passait et que le jour de l'accouchement approchait. Je lui ai parlé de mes peurs et elle m'a réconfortée. En 18 ans passés avec elle, nous n'avons jamais autant parlé que durant ce dernier mois. J'ai bien fait de la contacter.
Et puis est arrivé le jour, après quelques jours douloureux, la douleur m'a frappée comme jamais auparavant. Je me rappelle avoir dit à la sage-femme de sortir juste le bébé et de tout finir et parfois je pensais vraiment que j'allais mourir. Puis j'ai entendu le cri de mon enfant et la douleur s'est envolée au fond de ma tête, si loin que je ne savais même pas ou ne me souciais pas que j'avais mal. Tout ce que je voulais, c'était tenir mon enfant dans mes bras.
"C'est une fille, Votre Majesté." Dit la sage-femme avec un ton de sympathie.
J'ai tendu les bras et elle l'a placée dans mes bras. Les larmes ont inondé mes yeux juste à la sensation de la tenir et puis elles ont coulé sur mes joues comme des rivières en la voyant. Je n'avais jamais rien vu de plus beau. Mon coeur a fondu instantanément. La joie était si écrasante que je n'ai même pas prêté attention à Dina et Faust qui étaient là tout le temps.
Faust avait l'air si pâle et effrayé et pourtant soulagé en même temps. Il avait exprimé plusieurs fois sa peur de me perdre en accouchant, alors je comprenais pourquoi il semblait si terrifié. On aurait dit qu'il allait s'évanouir mais essayait de rester stoïque.
J'ai tendu ma main vers lui. "Viens."
Il s'est rapproché de moi en titubant et s'est assis à côté de moi. Nous avons tous les deux regardé notre enfant dans mes bras pendant un moment. Tous deux fascinés, émerveillés et très émus. Tout le monde dans la pièce nous a laissés seuls, même Dina sachant que nous avions besoin de passer du temps ensemble.
"Veux-tu la prendre dans tes bras?" Je lui ai demandé puisqu'il était si silencieux.
"Je pourrais la laisser tomber ou...ou la blesser." Dit-il, paniqué.
"Tu ne le feras pas, Faust. Tu es la dernière personne à lui faire du mal. Tiens."
Doucement, je l'ai placée dans ses bras. Il la tenait délicatement et doucement des larmes se sont mises à remplir ses yeux pendant qu'il étudiait son visage. Il a touché ses petites mains serrées avec son doigt et c'est là qu'une larme a coulé sur sa joue.
"Ciel." Il a murmuré.
"Je sais." J'ai souri. "Elle ressemble à un bout de ciel."
Il acquiesça. "Son prénom. Nous devrions l'appeler Ciel."
Ciel. C'était un beau prénom.
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À suivre !