Faust observa la femme en face de lui. Elle avait l'air si effrayée et si timide. Il se demandait si elle avait peur pour des raisons évidentes ou si elle était effrayée parce qu'elle eut vent des rumeurs qui couraient à son sujet.
Quoi qu'il en soit, il ne lui en voulait pas. La plupart des gens le redoutaient, même son propre père. Il n'osait jamais regarder son fils dans les yeux. Faust se demandait toujours ce qu'il put faire pour que son père le craigne.
Il savait qu'il était différent. Il eut même peur de lui-même lorsqu'il était un petit garçon et qu'il découvrit ce qu'il était capable de faire. Lorsqu'il eut, pour la première fois, déplacé un objet d'une simple pensée, ou lorsqu'il souhaita que son frère puisse brûler et que, soudainement, les vêtements de ce dernier s'enflammèrent.
Tout le monde courut pour l'aider à se débarrasser de ses vêtements enflammés. Ce jour-là, il eut tellement peur qu'il courut dans sa chambre où il s'assit dans un coin en pleurant, souhaitant pouvoir en parler à quelqu'un. Mais à qui ?
Son père le redoutait et le haïssait, il ne ferait que l'effrayer encore plus, et sa mère était morte. Il se demandait comment elle réagirait. Au début, ses frères jouaient avec lui, mais lorsqu'ils grandirent et commencèrent à s'entraîner, ils remarquèrent qu'il était plus rapide, plus fort et qu'il se battait mieux. Il était également très doué à l'épée ; ses professeurs le félicitaient toujours. Mais ses frères se moquaient de lui, lui disant d'arrêter de tricher.
"La tricherie, voilà ce que fait le diable", affirmèrent-ils.
Les servantes avaient des sentiments mitigés à son égard. Elles étaient autant attirées par lui qu'effrayées. Certaines d'entre elles aimaient le frisson, le danger. Les plus jeunes lui lançaient des regards séducteurs, mais les plus âgées les avertissaient. "Attention", dirent-elles. "Il tente les gens et les fait pécher."
Certaines personnes l'écoutaient, d'autres non. Les seules personnes qui ne le craignaient pas et ne le haïssaient pas étaient ses hommes, ses soldats. C'étaient des hommes durs qui ne croyaient pas aux rumeurs. Ils le respectaient. Pourtant, ils n'étaient pas sa famille ; il ne pouvait que parler affaires avec eux.
Il regarda la femme allongée à côté de lui. La femme qui était sa famille à présent. Elle était allongée si loin sur le bord qu'il craignait qu'elle ne tombe du lit. Elle ne bougeait même pas, elle avait l'air si raide. Bien qu'il lui eut dit de dormir, il put encore entendre son cœur battre à tout rompre.
Elle l'eut déjà surpris par ses questions audacieuses. Il l'aimait bien jusqu'à présent, elle l'amusait. Il se souvint de la tête qu'elle fit lorsqu'il lui annonça qu'il avait des maîtresses. Elle était probablement du genre jalouse. "Je suppose que j'aime la jalousie", pensa-t-il en se souriant à lui-même.
Il aimait aussi quand elle joua de la flûte, et quand elle murmura son nom. Mais maintenant, elle était aussi timide qu'un lapin. Et ça, il ne l'aimait pas.
**
**
**
Cette nuit-là, je fis un rêve. Je courais, terrifiée. Je courais pour sauver ma vie, et quelque chose me poursuivait. Quelque chose de sombre. Quelque chose qui voulait tuer. Je ne pouvais pas le voir, mais je pouvais sentir sa présence.
Il me voulait. Il était affamé et en colère et il ne cesserait de me chasser jusqu'à ce qu'il m'attrape. Je courus si vite que je...
... trébuchai sur mes propres pieds et je tombai. Il était proche maintenant, il allait me rattraper.
Une silhouette sombre sortit doucement de l'ombre. Elle avait des yeux rouges et des cornes. Des cornes noires, recourbées comme celles des diables. Elle tendit les mains vers moi. Je pus voir ses ongles qui ressemblaient plus à des griffes. Ils se rapprochaient. Je poussai un cri aigu et paniqué. Il me rattrapa, et maintenant, il me secouait.
"Ma Chère ! Ma Chère !" me dit une voix douce. J'ouvris les yeux en sursaut et je découvris Faust qui me surplombait.
"Vous ne risquez rien", assura-t-il en balayant quelque chose de mon visage. "Ce n'était qu'un rêve."
Je me mis à haleter et la sueur dégoulinait sur mon visage. J'étais...
... effrayée et confuse. Faust me tira contre sa poitrine. Il me prit dans ses bras et me caressa les cheveux.
"C'est bon", murmura-t-il doucement. "Détendez-vous et dormez."
Finalement, alors que je me trouvais dans ses bras, les battements de mon cœur reprirent un rythme régulier et je me rendormis à nouveau.
**
Lorsque je me réveillai, quelques servantes se trouvaient déjà dans la chambre, mais il n'y avait aucun signe de Faust. Je me souvins de la nuit dernière pendant que les servantes m'aidèrent à me préparer. Je fus surprise de constater que je ne fus pas touchée.
Il n'eut même pas essayé. Il dut être fatigué par le long voyage, mais ce soir, il n'y eut pas d'échappatoire. Je devrais peut-être lui parler et lui dire que je n'étais pas encore prête, pensai-je. La question était de savoir comment.
Je me levai du lit et les servantes m'aidèrent à prendre mon bain et à m'habiller.
"Son Altesse désire que vous vous joigniez à lui pour le petit déjeuner, Mademoiselle", m'informa l'une des servantes lorsqu'elle eut fini de me coiffer.
"Montrez-moi le chemin", répondis-je.
La servante me conduisit jusqu'au jardin situé juste à l'extérieur de la chambre.
Faust se tint debout, le dos tourné vers moi et les bras croisés dans le dos.
"Votre Altesse ?"
Il se retourna et je ne compris pas pourquoi mon cœur sauta un battement. "Ma Chère, avez-vous passé une bonne nuit de sommeil ?"
"C'est le cas, Votre Altesse. Et vous ?" Ce ne fut probablement pas le cas, mais je me sentis courtoise de le lui demander. Je dus certainement le perturber avec mon rêve.
"J'ai bien dormi. Aimeriez-vous prendre le petit déjeuner avec moi ?"
*
*
*
À suivre !