J'ai rapidement détourné mon regard et plongé mes yeux dans mon sac pour faire sortir mes crayons.
"Dis-moi, comptes-tu te servir de l'aquarelle ?" a-t-il demandé.
"Non... l'aquarelle ne conviendrait certainement pas aux yeux. Je vais utiliser des crayons de c... couleur", lui ai-je répondu alors que je sortais de ma pochette, quatre crayons couleur chair et un noir et un marron.
"Oh... l'année dernière, j'avais tenté d'utiliser des crayons de couleur, mais ça n'a pas bien fonctionné avec moi. J'avais du mal à faire correctement l'ombrage et le mélange. Mis à part cela, la qualité du crayon était médiocre. J'ai donc été obligé de laisser", a-t-il dit en soupirant et en regardant les crayons dans ma main. "Hmm… peut-être que je vais utiliser de la peinture à l'huile. Mais j'ignore si je serai capable de recopier à merveille tes magnifiques yeux bleus avec de la peinture à l'huile. Je n'en suis pas certain."
Mon cœur s'est aussitôt mis à battre rapidement. Il m'avait dit la veille que mes yeux étaient magnifiques et il venait encore de le dire. Se pourrait-il qu'il soit en train de flirter avec moi ?
"Qu'y a-t-il ?" m'a-t-il demandé alors que je tripotais les crayons dans ma main.
"Ahmm... le mien est un crayon Faber Castel Poly... c... chromos. C'est de bonne q... qualité. Tu pourrais l'acheter et l'essayer", lui ai-je recommandé.
Il a souri et a répliqué : "Quelle que soit la peinture que j'utilise et tout ce que je fais comme effort, je n'arriverai pas à dessiner tes beaux yeux bleu bébé aussi joliment qu'ils le sont", a-t-il déclaré.
"E... Ethan, cesse de dire ces genres de choses", l'ai-je réprimandé.
Il a souri en jetant un regard sur mon visage probablement troublé, puis il a dit : "J'ai juste dit ce que j'ai remarqué. D'accord, mettons-nous à l'œuvre."
Je me suis empressé d'accrocher un papier à dessin horizontalement sur mon chevalet, puis j'ai attrapé le crayon graphite de teinte claire pour dessiner le contour de ses yeux et de ses sourcils. J'ai débuté cela par la courbe des yeux sans vraiment le regarder. Cependant, il n'y avait aucun doute qu'il avait ses yeux fixés sur mon visage. Il me fixait intensément, mais je n'ai pas décollé mes yeux de la toile. Cela me rendait légèrement nerveux.
Une minute plus tard, alors que je ne le regardais pas, il a demandé : "Pour quelle raison fais-tu le dessin sans me regarder ? Tu ne pourras pas réussir les yeux puisqu'ils doivent me ressembler."
"Ils vont te ressembler", lui ai-je assuré sans le regarder. Il est alors resté silencieux et a croisé les mains. Lorsque j'ai fini avec le contour des yeux, j'ai été obligé de lever les yeux pour voir ses sourcils. Comparés à ceux d'Alex, ils étaient épais.
À peine ai-je levé mon regard qu'il s'est mis à sourire comme un idiot en me regardant. Les battements de mon cœur se sont accélérés automatiquement, et il a tout d'un coup serré les lèvres, car il était légèrement choqué. J'ai levé mon regard plus haut et j'ai jeté un coup d'œil rapide à ses sourcils épais qui sont arqués vers le haut vers la fin, lui donnant un léger regard intimidant. Ensuite, j'ai rapidement regardé ma toile, mon cœur ne s'arrêtant pas de battre fortement.
J'étais obligé de lever à maintes reprises les yeux pour finir avec le contour des sourcils. Mais il passait tout son temps à me fixait intensément, ce qui me rendait vraiment nerveux au point que mes mains se sont mises à trembler.
"Ahmm... j... j'ai fini le contour. Je vais à présent commencer le coloriage. Tu peux re... regarder ailleurs", lui ai-je dit.
"Il faut me regarder en le coloriant. Ça doit vraiment ressembler à mes yeux et à mes sourcils", a-t-il insisté.
"Pas besoin de te regarder avant de le faire", ai-je répliqué en inclinant mon chevalet et ma chaise vers la gauche pour ne pas avoir à le regarder.
"Pourquoi ? Se pourrait-il que je te rende nerveux ?" m'a-t-il demandé dans un murmure.
"P... pas du tout ! Je... je ne veux pas que tu me regardes de la sorte !" ai-je marmonné en réponse.
Il a ri, puis m'a demandé : "Alors que feras-tu lorsque ce sera le tour de te dessiner les yeux, le nez, les lèvres et tout ? Je serai obligé de trop te regarder."
"Tu me f... fixes déjà !" ai-je dit en inclinant mon visage vers lui. Je me sentais non seulement énervé, mais aussi nerveux. "N'as-tu pas dit que tu as pris la décision de passer à autre chose ? A... alors pour quelle raison agis-tu de la sorte ?"
"Qu'ai-je fait ?" a-t-il questionné en ouvrant grandement la bouche.
"Il faut que tu arrêtes de me fixer !" me suis-je plaint.
"D'accord... ça va !" a-t-il dit en détournant ses yeux.
"Et tu ne dessineras pas mes t... traits du visage en me regardant. Je vais te d... donner une de mes photos et tu la regarderas pour faire ton dessin", ai-je imposé.
"Ce n'est pas exactement ce qu'a recommandé mademoiselle Anderson. Alors Nate, je viendrai dans ton dortoir pour te dessiner."
Énervé, je l'ai foudroyé du regard pendant quelques secondes, et il me fixait également dans les yeux. Finalement, je me suis rendu compte qu'il ne le pensait pas lorsqu'il affirmait qu'il avait décidé de passer à autre chose. Que devrais-je faire à présent ? Comment me sortirais-je de cette situation ? Il n'était même plus possible que je demande à changer de partenaire puisque tout le monde s'est déjà mis à l'œuvre.
"Je regrette de t'a... t'avoir laissé t'associer à moi", lui ai-je dit en ricanant. Et il s'en est moqué.
"Pourquoi te comportes-tu de la sorte ? Ne t'ai-je pas déjà fait comprendre que je n'étais pas g... gay et que je n'étais pas attiré par toi ? Et t... tu as dit que tu comprenais cela."
"Hé... hé... Nate, pourquoi t'énerves-tu aussi simplement ? Que s'est-il réellement passé maintenant ? Je veux juste faire mon devoir normalement comme tout le monde et obtenir une bonne note. Je ne pourrai pas dessiner tes traits correctement si je devrais regarder sur une photo."
"Mais tu..."
"Hé ! Au fond là-bas...! Qu'avez-vous à bavarder au lieu de faire le dessin ?" a crié mademoiselle Anderson avant que je ne finisse ma phrase.
"Rien Madame ! Je le complimentais juste sur ses yeux bleus magnifiques, et il a dit que mes yeux marron étaient plus beaux et plus virils."
"Ferme-la !" ai-je ricané furieusement. Comment osait-il dire une telle chose tout haut devant tout le monde ?
Des chuchotements se sont automatiquement soulevés autour de nous et lorsque j'ai jeté un regard devant moi, j'ai vu mademoiselle Anderson qui nous souriait. "Assez de compliments. Continuez le travail !"
Gêné, j'ai hoché la tête, puis je me suis rapidement remis au travail en prenant mes crayons de couleur noirs, et en commençant à dessiner les sourcils d'Ethan. Bon sang ! Que faire de cet Ethan !
Je n'ai pas du tout levé ma tête depuis que je me suis remis à colorier. J'ai trop lambiné aujourd'hui. J'avais carrément les mains qui tremblaient à cause du fait qu'il avait maintenu son regard sur moi.
Afin de colorer ses pupilles, j'ai été contraint de le regarder à maintes reprises. Il me fixait intensément, ce qui faisait battre encore plus vite mon cœur dans ma poitrine. Je ne savais même pas pour quelle raison j'avais du mal à rester calme et confiant. Pourquoi est-ce que je devenais nerveux ? Ethan n'allait pourtant pas me tuer avec ses yeux ou quoi que ce soit du genre. Alors pour quelle raison ce cœur stupide battait si vite ?
De toute manière, j'ai terminé le dessin juste avant que la cloche ne sonne. "Terminé ?" m'a-t-il demandé alors que je posais mon crayon et détachais le papier du chevalet. J'ai hoché la tête puis j'ai ouvert mon classeur pour placer le dessin à l'intérieur. "Fais-moi voir !" a-t-il crié avec enthousiasme.
"Tu n'as pas besoin de le voir", lui ai-je répliqué.
"Allez… ce sont mes yeux. Laisse-moi voir", a-t-il insisté en gémissant presque. J'ai alors poussé un soupir puis tendu le papier vers lui, voulant éviter que mademoiselle Anderson et les autres tournent leurs regards vers nous.
"Waouh ! Je trouve mes yeux et mes sourcils tellement beaux !" s'est-il exclamé en gardant sa bouche en forme de "O", ses yeux ayant carrément la taille d'un ballon de football.
"Assez d'éloges. R... rends-le-moi !" lui ai-je dit.
"Non... je ne faisais juste que te louer. Tu es un grand artiste Michael !" m'a-t-il complimenté.
Venait-il de m'appeler "Michael" ?!
Mon cœur s'est instantanément mis à battre plus vite. Mais il s'est dépêché de rectifier en disant : "Je veux plutôt dire "Nate". Je suis navré."
"Ahmm... Ce... cela ne me dérange pas que tu m'appelles Michael", lui ai-je fait comprendre.
"Mais ça me dérange. Je t'appellerai exactement Nate", a-t-il dit avant de jeter à nouveau un regard sur le dessin. Un sourire s'est dessiné sur ses lèvres alors qu'il passait ses doigts dessus. Il est resté assis là, pendant une ou deux minutes, et regardait le dessin. Ensuite, il a pris son téléphone et a pris quelques photos de celui-ci.
"Tu as merveilleusement dessiné mes yeux ! Merci !" a-t-il fini par dire en me le rendant.
"Ahmm... merci... j... je t'en prie. Ethan, je veux te demander quelque chose", ai-je dit en prenant le dessin et en évitant de le regarder.
"De quoi s'agit-il ?" a-t-il demandé.
"Peux-tu, je te supplie, éviter de venir dans mon d... dortoir aujourd'hui ? J'ai un devoir de Physique demain et j'ai besoin d'étudier", lui ai-je dit alors que je plaçais le dessin dans mon classeur. Ce n'était pas faux, j'avais un devoir de classe demain.
"Entendu ! Mais je vais passer après-demain", a-t-il répondu et j'ai hoché la tête en me mordant les lèvres.
Arriver à échapper à Ethan était perdu d'avance. Maintenant, il faudra que je supporte travailler avec lui pendant trois semaines sur ce devoir. Et la semaine prochaine, j'allais devoir dessiner ses lèvres ! Ahh ! C'était carrément inimaginable pour moi.
Non seulement ça, mais il fallait que nous travaillions ensemble sur le devoir d'Histoire toute l'année. Comment allais-je m'y prendre ?
La cloche venait de sonner et je me suis automatiquement levé de ma chaise, puis je suis sorti en hâte de la classe après avoir attrapé mon classeur et d'autres affaires.
Dieu ! À quel moment allais-je enfin arrêter de courir ?