Point de vue de Nate
Me suis-je préparé pour aujourd'hui ? Je cherchais mon reflet dans la glace pour trouver des réponses. Deux yeux bleus anxieux me fixaient depuis le miroir via le rideau formé par des mèches marron.
Ce jour était lundi. J'avais cours de Calcul avec Ethan et ses deux amis. Allaient-ils me traquer encore dans le but de me tyranniser ? Devais-je abandonner la classe de Calcul ? Mais pendant combien de temps allais-je me dérober à eux et sauter le cours de Calcul ? Il fallait que j'y aille. Je prendrai siège juste quelque part devant et j'éviterai de les observer.
J'ai secoué la tête en me contemplant dans le miroir, puis je me suis retourné en quittant la pièce, pour me diriger à mon premier cours qui était la biologie.
Alors que la cloche tintait après la première heure, mon cœur s'est mis à battre terriblement vite. Que fallait-il espérer prochainement ? J'ai fait des pas anxieux vers le cours de Calcul en priant dans mon esprit pour que les deux ou peut-être tous les trois manquent le cours de Calcul ce jour-ci ou qu'ils m'oublient complètement.
J'ai fait mon entrée dans la classe. Seuls quelques étudiants étaient là. Je me suis assis dans le coin gauche de la deuxième ligne, observant nerveusement les portes. La cloche a retenti après quelques minutes et la classe est quasiment remplie dans la minute qui suivait.
"Je vous en prie, ne venez pas aujourd'hui. Demeurez où que vous soyez en cet instant. Ou manquez simplement la classe et allez au cinéma", ai-je dit dans un souffle. Examinant les portes et à ce moment-là, je les ai aperçues tous les trois surgir d'on ne sait où dans le couloir. J'ai baissé les yeux sans tarder en jurant dans ma respiration.
Je n'ai pas levé mon regard lorsqu'ils entraient dans la classe. Mais je pouvais remarquer leurs pas confiants avancer lentement. Ils se sont traînés vers le fond de la classe et prenaient sans doute leurs sièges usuels à l'arrière. Je n'ai pas osé tourner en arrière pour observer.
Bientôt, le professeur Monsieur Hibbert est arrivé et a commencé à marquer les présences. Je commençais à méditer sur des astuces pour les esquiver d'une manière ou d'une autre après ce cours. J'ai opté de m'enfuir de la classe dès que la cloche retentira.
Monsieur Hibbert a levé alors son regard vers nous, fermant le registre. "Étudiants, nous avons un conseil de matière en cette heure. Par conséquent, je ne pourrai pas poursuivre les cours. Vous les gars, asseyez-vous et faites l'exercice un et deux à la page numéro dix-huit. Nous discuterons des problèmes pendant le prochain cours."
Tous les étudiants ont hoché la tête en signe d'acquiescement avec des sourires sardoniques proéminents sur leurs faces. Il était évident qu'au départ de monsieur Hibbert, la classe se videra.
"Toi...", monsieur Hibbert a désigné alors une fille assise au milieu de la première ligne. "Tu veilles à ce que personne ne sort de la classe jusqu'à ce que la cloche retentisse. Et si quelqu'un s'en va, notes son nom et donne-le-moi." La fille a hoché la tête et quelques personnes ont poussé des soupirs d'agacements.
Il s'en est allé alors. J’espérais voir les gens quitter la salle, mais personne ne s'est déplacé en réalité de sa chaise. Personne n’était prêt à dilapider la participation gratuite. Et ce n'était qu'à ce moment-là que je me suis rendu compte que j'étais coincé avec les brutes à l'intérieur de la classe. Et l'effroi a commencé à m'envahir, ne sachant pas quoi faire.
Peu de temps après, j'ai sursauté fortement, soudainement une boule de papier froissée a cogné l'arrière de ma tête. Cela venait surement d'eux. Ils ne m'ont pas oublié. Mais je ne regardais pas en arrière. Une autre boule a tapé ma tête et j'ai perçu des gloussements autour de moi. Puis des boules de papier ont commencé à heurter ma tête incessamment avec des rires tapageurs. J'ai maintenu ma position de ne pas regarder en arrière.
"Hé... retourne-toi. Ne désires-tu pas observer notre ami aujourd'hui ?" ai-je entendu Kevin dire. Je me mordais la lèvre par exaspération alors que tout le monde tournait la tête en arrière et les regardait, abasourdi et diverti.
"Les gars, vous souhaitez savoir ? Il a baisé du regard notre pauvre Ethan la semaine passée. Et cela n'a pas duré une minute ou deux, une heure complète", a dit Amélia en se marrant. J'entendais des gens dans mon alentour murmurer "Est-il gay ?" Mes oreilles cherchaient la voix d'Ethan. Mais je ne l'entendais pas.
"Et êtes-vous déjà au courant de ce truc, les gars ? Il ne peut même pas exprimer un mot sans bégayer. Même son propre nom", a calomnié Kevin. Tous ceux qui m'entouraient m'observaient en chuchotant des choses entre eux.
"Hé… Peux-tu s'il te plait nous indiquer ton nom encore une fois. Nous ne nous en rappelons pas", Amélia a gloussé à l'arrière. Je ne regardais toujours pas en arrière. Je sentais des larmes commencer à se former dans mes yeux. Mon cœur me faisait mal à l'idée qu'Ethan ne faisait rien pour les interrompre.
"Oh… pauvre garçon, il est incapable de dire son nom. Ou peut-être qu'il a oublié ? Le jour précédent, il a vraiment oublié son nom. N'est-ce pas ?"
Ces paroles sont suivies d'une grosse boule de papier qui a heurté l'arrière de ma tête.
"Hé, garçon bègue ! retourne-toi et présente-toi."
Il fallait que je m'en aille. Je ne pouvais pas rester une seconde de plus à cet endroit. Je devais m'évader de là. Je me suis levé promptement de la chaise et j'ai commencé à me lancer hors de la classe.
"Hé ! pars-tu ? Garçon bègue, tu vas perdre la présence", a hurlé Kevin et il s'est esclaffé par la suite.
"Hé attends ! Quel est ton nom ?" m'a hurlé la fille devant, que monsieur Hibbert a responsabilisé d'écrire les noms. Je me suis rué aux portes, sans lui répondre.
"C'est Mi... mi... N... N... Nate", lui a répliqué Amélia avant de pouffer de rire. Toute la classe se marrait avec elle alors que je chancelais hors de la classe, les larmes se préparaient à couler du coin de mes yeux.
Je suis allé à la bibliothèque et je me suis assis dans un coin durant toute l'heure, me donnant du mal pour ne pas sangloter. Puis, quand la cloche a tinté, je me suis avancé vers ma prochaine heure de géographie et j'ai pris siège à l'arrière en éprouvant l'opprobre et la panique. J'étais apeuré, certaines personnes de la classe de mathématiques étaient là et elles commençaient à chuchoter des choses sur moi à tout le monde. Et très vite ma peur est devenue concrète lorsque j'entendais des murmures autour de moi.
L'humiliation a enfoncé ses dents en moi. Ils n'avaient pas tort. Parfois, j'étais même incapable de dire mon nom sans babiller. J'étais en réalité une personne pitoyable, imbécile et sans valeur. Une larme a coulé de mon œil gauche et je l'ai vite essuyé avant que le professeur ou quelqu'un d'autre ne le réalise. Par bonheur, l'enseignante nous tournait le dos, notant quelque chose sur le tableau blanc.
L'heure de cours s'est vite envolée. Dès que la cloche a retenti, je me suis lancé hors de la classe vers mon dortoir et je me suis écroulé sur mon lit en fondant en larmes. Je n'ai pas déjeuné. Je suis demeuré étendu sur mon lit jusqu'à une heure trente. Puis j'ai saisi mon sac et marché jusqu'à mon heure suivante.